La viticulture en Afrique du Sud en 2021 | Résilience et optimisme

Jane Masters MW est la Master of Wine d’Opimian

 

La qualité des vins sud-africains se compare à celle des vins du monde entier. Le ciel bleu sans nuages du Cap, l’ensoleillement, la proximité de la fraîcheur océanique de l’Atlantique et de l’océan Indien plus chaud, ainsi qu’une abondance de contreforts montagneux se conjuguent pour créer un éventail de terroirs. 

 

Un esprit entrepreneurial dynamique a transformé ce secteur de l’industrie sud-africaine, qui considérait le vin comme un simple sous-produit du brandy. Plusieurs des meilleurs producteurs de vin actuels du Cap, comme Aristea et Kershaw, n’existaient pas il y a vingt ans. Depuis les années 90, les viticulteurs ont planté des vignobles à la recherche de nouvelles zones à la fois dans les régions à climat frais et chaud. Parallèlement, les viticulteurs sud-africains se sont pris d’affection pour les vieux vignobles du pays situés dans des régions plus chaudes et sèches, constitués de cépages auparavant utilisés pour la production de brandy.

 

Cependant, tout n’a pas toujours été rose dans le district de Cape Winelands. Le Cap a souffert d’une grave sécheresse suite à trois années de faibles précipitations. Juste au moment où il récupérait, la COVID-19 a frappé. Le bilan négatif de la COVID-19 sur le commerce du vin en Afrique du Sud a été alourdi par quatre interdictions d’alcool imposées par le gouvernement. Celles-ci ont duré au total plus de 161 jours, empêchant les ventes intérieures et restreignant les exportations de vin. En même temps, le tourisme viticole a connu un déclin important. Pour les vignobles tributaires des ventes intérieures, cela signifiait des problèmes de liquidités, voire pire. Plus tôt dans l’année, 18 000 emplois répartis dans 80 vignobles et 350 viticulteurs étaient menacés. L’absence de ventes signifiait également des cuves pleines et moins d’espace pour recevoir les récoltes.

 

Carol Fourie

Dans ce contexte, j’ai discuté avec Corlea Fourie, responsable du vignoble et du vin chez Bosman Family Vineyards, et Lukas Wentzel, de Groote Post, des défis et des joies d’être vigneron au Cap en 2021. Les vendanges sont un moment que tous les viticulteurs du monde attendent avec impatience et enthousiasme. C’est l’aboutissement du cycle annuel dans le vignoble et de la préparation dans la vinerie. C’est une période relativement courte, mais très intense, où le travail des vignerons porte ses fruits. Toutes les idées qui se sont forgées dans l’esprit des vignerons depuis la récolte précédente peuvent enfin se concrétiser.

 

Lukas Wentzel

Après des années de sécheresse et de restrictions d’eau, la saison de croissance 2020-21 a permis aux sols de profiter d’une bonne réalimentation en eau. Corlea et Lukas s’accordent à dire que les conditions estivales fraîches ont permis aux raisins de mûrir lentement, développant une robe et une saveur exceptionnelles. Décider du bon moment pour vendanger ne dépend pas seulement de la maturité des raisins, mais aussi des prévisions météorologiques et des contraintes pratiques de débit et de capacité dans la vinerie. Pour de nombreuses régions viticoles, cela peut signifier récolter avant les pluies d’automne. En Afrique du Sud, les années de sécheresse précédentes ont permis de récolter les raisins avant que les niveaux de sucre ne montent en flèche, que l’acidité ne chute et que les raisins ne commencent à se déshydrater. En 2021, les températures plus fraîches et le beau temps ont permis aux viticulteurs de prendre leur temps pour cueillir les raisins au bon moment, alors que l’acidité naturelle et la maturité phénolique étaient élevées. Corlea et Lukas en sont tous deux très heureux. Les raisins ont généralement été cueillis deux semaines plus tard que les années précédentes, le nombre de grappes et la taille des fruits ont contribué à une augmentation du rendement. Selon moi, cela se traduit par des rouges aux robes profondes, de généreuses saveurs de fruits des bois mûrs et une excellente structure tannique. Les vins blancs sont également frais et débordants de fruits, tant le Generation 8 Chenin Blanc de Bosman et le First Lady Sauvignon Blanc de Warwick, qui sont des Coups de Coeur instantanés.

 

À propos de l’impact de la COVID-19 : de l’adversité naît la créativité. L’équipe de Corlea s’est rapidement adaptée à une nouvelle façon de travailler, avec des quarts de travail conçus pour minimiser les contacts, et des réunions tenues à l’extérieur. Des masques ont été fabriqués pour l’entreprise par le club des femmes, et Bosman a fabriqué son propre désinfectant. À l’instar de nombreux vignobles d’Afrique du Sud, l’entreprise n’a ménagé aucun effort dans le domaine des médias sociaux et du commerce électronique pour compenser le bouleversement dans les réseaux de vente. Pendant ce temps, Corlea signale qu’il y a eu un changement dans les préférences des clients, les aspects environnementaux et de développement durable devenant plus importants.

 

L’impact de la COVID-19 se poursuit et entraîne des répercussions tout au long de la chaîne d’approvisionnement, affectant notamment la disponibilité des bouteilles en verre. La pénurie actuelle est due à des arrêts cycliques de production dans les fonderies locales. La disponibilité de presque tous les produits – étiquettes en papier, bouchons, capsules, cartons – est également restreinte, sans parler de la perturbation du fret et des ports. Ainsi, en 2021, il semble qu’un grand nombre de défis pour les viticulteurs sud-africains ne résidaient pas tant dans la vinification comme telle, mais plutôt dans la gestion de problèmes opérationnels. L’Afrique du Sud a prouvé qu’elle était résiliente. Elle surmontera ces difficultés et continuera à produire des vins de grande qualité. Pour citer un autre producteur d’Opimian, Mike Ratcliffe de Vilafonté : « L’avenir est prometteur ! »