par Martin Krajewski, propriétaire, Clos Cantenac et Château Séraphine
L’appellation Pomerol et ses limites n’ont été officiellement reconnues qu’en 1928, mais le caractère unique des différents terroirs et sols est resté inchangé depuis des millions d’années.
Le point culminant de Pomerol est connu sous le nom de « colline de Petrus », mais le terroir de l’appellation est un mélange complexe d’argile, de gravier, de sable, de crasse de fer et d’oxyde de fer, bien que ce soit les sols argileux qui produisent les vins les plus riches, les plus denses, les plus opulents et les plus flamboyants, avec un caractère sensuel et riche.
L’argile est un produit de la dégradation du calcaire, ce qui explique que l’on trouve souvent du calcaire et de l’argile dans un même terroir. Cela s’explique par le fait que le calcaire est riche en pH et en calcium et qu’il finit par se dégrader avec le temps et l’érosion. Les sols argileux peuvent également contenir un niveau élevé de CEC (capacité d’échange cationique), un facteur important qui permet aux sols d’apporter davantage de nutriments aux vignes. Ce terroir unique à dominante argileuse, ainsi que les plantations prédominantes de vignes de merlot, en font presque toujours la première grande région de Bordeaux à faire la récolte, mais il existe plusieurs types d’argile dans les sols de Pomerol, notamment la célèbre argile bleue.
Cette argile smectite bleue, dont l’âge est estimé à près de 40 millions d’années, est incroyablement dense, ce qui la rend presque impossible à pénétrer pour les vignes. Cependant, dans les millésimes humides, elle agit comme une éponge avec une incroyable capacité à se dilater et à retenir l’eau. Il faut certes compenser cette capacité par des systèmes de drainage efficaces et du gravier, mais c’est exactement ce qui se produit naturellement dans les meilleurs vignobles d’argile bleue.
Par conséquent, les molécules d’eau sont capables de pénétrer dans les espaces moléculaires intercouches de l’argile, de sorte que lorsque les mois d’été secs arrivent, les vignes peuvent encore se nourrir de l’humidité dont elles ont tant besoin.
Vous ne serez donc pas surpris d’apprendre à quel point nous avons été ravis lorsque Xavier Chone, notre Conseil du Terroir (conseiller viticole) a pu confirmer ses soupçons déjà très forts sur la présence d’argile bleue dans nos nouveaux vignobles au Château Séraphine. L’analyse de Xavier a consisté à creuser une série de tranchées de trois mètres de profondeur, qui ont révélé cette fameuse mais insaisissable argile recherchée.
C’est évidemment une découverte qui a suscité une grande joie et beaucoup d’enthousiasme, car elle indique que même dans les années de sécheresse les plus graves, nous pourrons encore espérer récolter des fruits de grande qualité. C’est le rêve d’un vinificateur, car lorsque ces éléments cruciaux se combinent avec succès, le résultat est un grand vin sensuel et hédoniste, offrant des parfums complexes de truffes, de chocolat, de fleurs, de cerises noires, de prunes et d’épices exotiques qui non seulement séduisent et envoûtent, mais qui récompensent aussi la patience et un temps de garde minutieux.
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L’Innocence de Séraphine, AOC Pomerol, 2019, lot 2598
